Bravo à Bibimbap et Maeve ! Outre qu'ils aient tous les deux rejoints mon dressing samedi, la robe Tara Jarmon et les escarpins La Halle ont un point commun : ils sont fabriqués en France. On peut donc acheter des chaussures françaises pour moins de 1000 euros, ouf! Pour la robe, ahem, c'est autre chose et une longue aventure que je vais vous raconter. Une séance de shopping, on croit que c'est futile. Erreur, parfois, c'est une révélation, ou plus exactement, une confirmation.
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| collection Charlotte Sometimes |
Je m'en suis rendu compte samedi. A 16 h, je me suis jetée dans les grands magasins, comme des milliers de Français. La bonne idée... Il me "fallait" une robe. Sauf que :
- je hais les essayages en hiver, quand tu dois enlever 10 fringues, les renfiler, puis les enlever à nouveau, puis les renfiler, dans un espèce de cycle infernal argh!
- donc pour limiter les dégâts, je me décide à faire les grands magasins, le seul endroit où tu peux essayer des robes de 3 marques différentes en croisant les doigts pour qu'il y en ait au moins une qui t'aille.
Cauchemar. Je hais (aussi) les grands magasins, leurs fabuleuses promo (15 % sur un truc à 3000 euros si tu es porteur de la carte et après 17 h au-delà de 4500 euros d'achats....). Aux Galeries Lafayette, entre la foule, les prix délirants pour des chiffons jetables en polyester et les robes à 50 % de mon salaire qu'on ne peut nettoyer qu'au pressing, j'étais au bord du malaise. J'ai inspiré, expiré, doucement et j'ai réussi à me traîner jusqu'au Printemps. Là, je me suis retrouvé confronté à mon drame : la mode n'est pas faite pour les A. Ni les X. Ni les O. Ne survivent que les I et les H. Toutes les robes me rappelaient cruellement pourquoi je n'en porte quasiment plus, en général, ça flotte en haut et ça boudine en bas. Voire ça flotte en haut et ça ne rentre pas en bas (Foutu 2 kilos en trop, les Kinder et moi, c'est fini).
A 17 h 14 et 8 robes, j'étais au bord des larmes. Dans un dernier sursaut, j'ai rampé jusqu'au corner Tara Jarmon. J'ai toujours adoré cette marque et je la soupçonnais d'avoir des coupes faites pour mon derrière à la Kim K et mon buste à la Kate M. Mais bon, Tara Jarmon... voilà, quoi. C'est pas le genre de truc que tu t'achètes quand tu as 3 gosses à habiller et que tu veux continuer à payer ton loyer. Et puis la vendeuse est arrivée, toute souriante. Mais vraiment, vraiment souriante.
Elle a gazouillé "Je peux vous aider ?"
"Heu, je cherche un truc à me mettre."
"Quel genre ?"
"N'importe quoi dans lequel je me sente pas trop moche."
J'avais l'impression d'être Julia Roberts dans sa fameuse scène, criant "J'ai rien à me mettre!!!"
Elle m'a fait essayer 3 robes, a appelé sa collègue du stand Sandro à la rescousse avec 5 autres robes, ba dit "ça ne va pas du tout, de toute façon, cette robe ne va à personne" quand j'ai essayé un truc qui flottait grave en haut et boudinait affreusement en bas et m'a dit "bonne soirée" quand je suis reparti sans rien acheter. Toujours avec un grand sourire, un vrai. Et elle n'a pas rangé en rayon cette petite robe rouge, non, elle l'a accrochée discrètement dans un coin. La meilleure vendeuse du monde quoi.
Du coup, après un tour chez Kookaï, je suis revenue. Et j'ai acheté la robe à 260 euros.
Comme la robe en brocart chinée chez Shop Vintage, je vais ranger cette petite robe rouge dans la catégorie de mes vêtements porte-bonheurs, ceux qui parlent. Elle me rappelle que :
- J'ai décidé d'acheter en priorité du made in France, et ç'a un prix.
- Et d'acheter moins, donc j'ai le droit de m'acheter une belle pièce une ou deux fois par an. Parce que je le vaux bien.
- De dire adieu au noir. Elle existait aussi en noir mais c'était tristounet, en fait.
- Et chaque fois que je la verrai, je repenserai à la gentillesse et à la compétence de la vendeuse.
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| 100 % made in France, de 75 à 260 euros |
Samedi, j'ai voté avec ma carte bleue, de plus en plus persuadée que c'est ce qui fonctionne. Si Lip a relocalisé sa fabrication en France, c'est bien parce que c'est vendeur. Le made in France est-il un piège à gogo ? Non, je crois que c'est une façon de rappeler que les travail a un prix, les conditions sociales aussi, de limiter (un peu) les transports, de soutenir les ateliers qui se battent pour garder leur travail. On ne peut pas se désoler des 10 % de chômage et regarder les usines françaises fermer en se réjouissant d'acheter 15 robes made in China ou Ethiopia.
« Le libre échange, la délocalisation, c'est formidable, la France peut se spécialiser dans les services, disent les spécialistes. Ils oublient qu'un quart seulement des emplois perdus par l'industrie bascule vers les services. Où vont les autres ? C'est une économie du cynisme. On va dans le mur en proposant d'acheter pas cher à des gens qui n'auront bientôt plus les moyens d'acheter du tout puisqu'ils n'auront plus de travail », me disait Fabienne Delahaye, fondatrice du salon MIF expo.
Entendre les arbres tomber et fermer les yeux, je ne peux plus. Ici, la fabrique Lener Cordier, dans le Nord, qui s'accroche, malgré 37 licenciements... là, les dentelles Desseilles qui ont failli déposer le bilan, ou encore, la petite créatrice de Mutti qui a dû mettre sa société en sommeil pour manger.
Il ne faut pas être naïf, il y a des marques qui surfent sur la vague et collent des étiquettes sur des produits fabriqués à l'étranger. Il y a aussi des ateliers très moches en France et certaines des pièces étiquetées made in France sont cousues dans des conditions indignes, dans des caves parisiennes ou des pavillons de banlieue. Mais là, c'est à l'Inspection du travail et à la DGCCRF de faire son job. J'ai fait le mien.
PS : pour celles qui aimeraient trouver du made in France facilement, on en trouve pas mal chez Bocage. Presque toutes leurs bottes sont faites en France. Et La Halle avait eu la bonne idée de lancer une collection complète made in France, fabriquée dans les Vosges. Ces escarpins, par exemple, coûtent 75 euros. Par contre, je ne les ai pas encore reçus, alors je croise les doigts pour rentrer dedans!