Est-ce bien raisonnable...

La chronique "Est-ce bien raisonnable... ?" de Marc Baugé me fait souvent rire. J'ai même acheté le livre éponyme. L'auteur croque d'une dent alerte les errances de la mode masculine : la folie des lunettes + barbe + moustache, par exemple, les tee-shirts sous les chemises, les baskets ouvertes ou les pieds nus (et de facto les mollets poilus, pire, imberbes, apparents, tssssss) dans les Doc...

Je partage souvent son point de vue. Mais il a la main lourde quant à la dose de "bon goût" et de vestimentairement correct exigé et menace de devenir un ayatollah de la mode. Son dernier anathème a fait grimper Monsieur London au rideau :

Désolation partagée par Le Flageolet... et par moi-même! Monsieur London, comme Le Flageolet, est une jeune marque d'accessoires qui met un peu de fantaisie dans la garde-robe masculine. Dans les trucs à la mode, je n'aime pas tout : je préfère me promener sans sac à main que voir mon mari avec une cravate en laine, par exemple et si certaines bizarreries semblent en effet fort peu pratiques et hygiéniques (les pieds nus dans des Doc, ou des derbies, beurkkkkk), si d'autres sont une atteinte à la pudeur esthétique (moustache + barbe + lunettes, argggh), l'intégrisme de Marc Baugé en vient à tuer toute fantaisie.
Hors du total look de pingouin, point de salut. C'est tout de même triste, non ?

J'ai des goûts plutôt classiques mais je bave d'admiration devant les italiens chics photographiés par The Sartorialist. La tenue Gucci toute fleurie, ici, à droite, me semble carrément portable.

La couleur, c'est l'humeur, c'est la vie. Pourquoi les hommes en seraient-ils privés ? De quel droit les cantonnerait-on au costume anthracite ou marron (re-beurkkk, j'ai le costume marron et le marron en général, en abomination) ?

photo Frédérique Veysset, in You're so french men!

Le  complet-veston sombre ne leur fut imposé qu'au début du XX° siècle. Avant, leurs tenues étaient aussi, si ce n'est plus, richement décorées que celles de leurs conjointes.

Velours dévorés, tissus brodés, soies damassées ou à reflets, pierreries, fil d'or, accessoires de toute sorte, nœuds, dentelles, plumes, gants, chapeaux, veste d'intérieur, des pieds à la cape, ces messieurs soignaient chaque pièce de leur tenue.

Alors pourquoi stigmatise-t-on aujourd'hui une chemise rose, un sweat à fleurs, un pantalon à rayures inégales, un nœud pap' à pois ? Je serais un homme, ça me ferait suer d'être condamné au bleu ciel / beige / noir / camel à vie. Même les petits garçons sont formatés pingouin ou bidasse, avec une palette de couleur sinistre (j'ai cherché un pull violet pour Lutin n°3, impossible! Idem pour un tee-shirt à manches longues rouge ou vert anis... C'était gris, kaki ou beige, point).

Comme pour les femmes, le bon goût est une question de personnalité, de choix et d'équilibre.

Les dernières collections prêt-à-porter pour homme, pleines de couleurs et d'imprimés, font plaisir à voir. Cette fantaisie qui renaît dans la mode masculine nous secoue un peu, ça oblige aussi les créateurs de mode féminine à se renouveler s'ils ne veulent pas être éclipsés.